Jour 1 : 22 novembre 2018 Arrivée à Phnom penh le 23 à 10h00. Lamvinh m’attend avec un taxi. Direction Pursat (deux heures de route). Arrivée vers 14h00… A priori, c’est ça le Cambodge ! Douche et petite sieste, avant d’aller faire la visite de l’hôpital où Lamvinh a du travail avant d’accueillir la mission Enfants Du Noma 2018. Retour à l’hôtel pour prendre le repas et dodo, Auriol is dead !!! Jour 2. Levé 6h00. Rendez-vous prévu avec Mr le responsable de la santé et de l’éducation de la province de Pursat le DR Khoy Dy. Je n’avais pas compris qu’il s’agissait d’un petit dèj. Je n’ai donc pas freiné sur le buffet à l’hôtel. Erreur !!! Je prends simplement un café. ça ne plait qu’à moitié, je suis l’invité. Je force un croissant alors que Lamvinh, pour faire bonne figure, pousse jusqu’au bouillon de vermicelle poulet… S’en suivent des discussions intéressantes sur sa façon de voir les choses et de mener sa politique. Ses lubies : les bouteilles plastiques, l’éducation à la propreté partout (hôpitaux, écoles…) et les arbres. Il part du principe qu’ils sont précieux pour la santé mentale des malades dans les centres de soins et les hôpitaux. Lamvinh lui glisse habillement que nous recherchons des écoles qui ont besoin d’aide. Grâce à quoi il nous invite à prendre part à sa tournée d’inspection des centres de soins de la province, le lendemain. Nous en profiterons pour nous arrêter dans deux écoles  spécialement en difficulté. Lamvinh donnera dans chaque centre des consignes et des affiches pour recruter des patients susceptibles de bénéficier de l’équipe chirurgicale d’EDN qui arrive dans une semaine. Nous faisons ensuite la visite du CH référent de Pursat où il explique à Lamvinh tous les axes d’amélioration qu’il veut entreprendre et la façon dont il pense pouvoir organiser les salles de bloc pour EDN.

Premier site visité, Oukaki Village, province de Kampong Chhnang

Fin de matinée, nous partons pour Kompong Chhnan, la province voisine. Le temps de passer prendre Sean Chandara, moine bouddhiste qui a parlé de l’école à Lamvinh, nous nous enfonçons dans la campagne en direction d’Oukaki. Arrivé là-bas nous apprenons qu’une autre association a déjà entrepris de construire un bâtiment supplémentaire. Le besoin urgent est la bibliothèque (pas d’accès aux livres) et le raccordement électrique. Projet intéressant mais difficile à mettre en place. Accès difficile, personne ne parle anglais, pas d’internet, changement d’objectif par rapport à ce que nous avons lancé sur le net… Bref on garde les infos et on avance. On décidera de la faisabilité des différents projets à la fin.

Oukaki a besoin d’un raccordement électrique et de livres.

 

L’école primaire « rénovée » d’Oukaki : un mur en bambou et un toit neuf.

 

L’intérieur de la classe.

  Retour à l’hôtel, plus de 200 bornes au compteur.  Massage, manger, dodo. Jour 3. Levé 6h00. Mr KHOY passe nous prendre à 7H 30. Après un bon petit dèj, nous sommes d’attaque. Mais ce coup ci, c’est Lamvinh qui n’a pas compris qu’il fallait déjeuner léger ! Dy ordonne un stop devant un restaurant pour aller nous sustenter. Horreur !!! On ne va pas le froisser deux fois de suite, nous devons commander un plat… vermicelle poulet, c’est le plus light! Nous reprenons la voiture pour débuter la tournée. Nous faisons halte au centre de soins de Bhum Vath Kandong. L’école jouxte le centre. C’est une volonté du gouvernement de rapprocher centres de soins et écoles pour mieux maîtriser les vaccinations notamment. Centres de soins, école et…maison du parti (Cambodian people’s party), tiens, c’est bizarre, c’est pour maîtriser quoi ça ???  Ici, le projet et un peu décevant car l’école et le collège sont en dur et en bon état. Mr KHOY nous montre une vielle grange délabrée qu’il aimerait faire aménager en  « centre culturel et éducatif ». En gros, il souhaiterait avoir une salle de conférence pour les collégiens et des toilettes avec des éviers pour pouvoir continuer à marteler « ongles propres, mains propres, avant d’aller en cours ! ». Il a décidé de reprendre l’éducation de la province à la base. Il en va de même pour les déchets plastiques… Ici, le projet est intéressant, mais l’urgence relative. Les lombaires commencent à donner des signes de fatigue, les km du jour s’additionnant à ceux de la veille. Mr Khoy est ravi de nous montrer les progrès réalisés en terme d’hygiène dans les centres de soins ruraux. C’est vrai qu’il sont propres par rapport à tout ce que j’ai pu voir en ville. Lamvinh, lui, est stupéfait et ému de voir de tel progrès dans ce domaine. Il me confirme qu’il y a eu un virage à 180° depuis que Mr Khoy est aux affaires. En chemin, nous nous arrêtons quelques fois dans ces petites cahutes faites de bric et de broc qui bordent les routes. On y trouve, maïs bouilli, papaye, essence, rasoir, bananes… Nous nous enfonçons ainsi au plus profond de la province de pursat, direction le district de Viel Veng ancienne place forte Khmer rouge. Lamvinh tient à me faire découvrir à chaque repas des mets traditionnels. Jusqu’à présent à une ou deux exceptions près, je suis agréablement surpris. Nous dégustons des poissons d’eau douce frits dont je me souviendrai. Une fois de plus pour 2 euros nous avons mangé comme des rois.  Nous n’avons qu’à traverser la route pour découvrir l’école de Pra moy (la trompe de l’éléphant). Je ne soupçonnais pas ce qui m’attendait dans cette école…

L’école de Pra Moy, province de Pursat

Pour commencer, un véritable comité d’accueil. Mr le Gouverneur de district, Heng Sopheana, Le directeur de l’école, le président du comité local d’urbanisme et d’éducation (la taupe du parti) et 6 instituteurs. Vous rajoutez Mr Khoy responsable éducation de la province et vous avez une très belle photo, un dimanche qui plus est!!! Tout de suite, je suis saisi par les regards, les visages, les sourires. Un mélange de bienveillance et de détresse. J’ai vraiment l’impression d’être quelqu’un d’important plus encore je suis reçu tel un Messi. Rapidement, Mr le gouverneur prend la parole pour m’expliquer la situation. Rapidement, j’ai l’impression d’être à l’endroit exact que nous imaginions pour Partage d’Ailleurs. L’endroit où l’urgence nous impose de faire quelque chose et où tous les éléments sont favorables à notre réussite.  

Accueil par tout les responsables locaux et le corps enseignant à l’initiative de la construction.

 

Le bureau du directeur.

La problématique. Une école vieillissante qui n’arrive pas à suivre la démographie locale. Les bâtiments en bois donnent d’évidents signes de faiblesses mais surtout, cachée derrière le bureau du Directeur, une classe à ciel ouvert. Aucun mur si ce n’est celui dudit bureau, auquel est accroché le tableau. Des tables et des chaises instables suivent la pente du sol. Plus loin se trouve le seul bâtiment en dur de l’établissement. Assez massif par rapport aux autres, il mesure 20 mètres par 12 pour une hauteur de 4,50. Problème, sa construction a démarré il y a deux ans, il n’y a toujours pas de toit, de fenêtres, de ravalement… Deux ouvriers sont occupés à planter les trois clous qu’il reste et le gouverneur m’explique que les travaux ne peuvent continuer faute de moyens. Je ressens bien l’enthousiasme et l’attente que suscite ma venue.  

Coincée entre le bureau du directeur et un ravin, une classe à ciel ouvert.

 

Objectif: un toit avant la saison des pluies !

Avec Lamvinh, nous mettons rapidement en balance les pour et les contre. Rapidement parce que le seul contre, c’est le budget. Il est estimé à 7000 $ soit 5600 €. Les pour : caractère d’urgence évident, accueil par les plus hautes autorités, donc carte blanche, possibilité de communiquer en anglais,  accès à internet, accès depuis Pursat environ deux heures de routes en bon état, région rurale magnifique pour venir passer quelques jours et suivre les avancées… Mais surtout quelle « belle » histoire!!! Je comprends de mieux en mieux ce qui me vaut tant de gratitude. On nous explique que nous sommes dans l’ancien bastion khmer rouge et dans un endroit reculé. Deux facteurs défavorables pour reconstruire.  Les khmers rouges ayant totalement dévasté la zone avant de disparaître, cette région partait de loin en 1985. De plus, le gouvernement priorise largement les villes au détriment de ces zones reculés quand il s’agit d’allouer des subventions. Livrés à eux même, les instits ont entrepris la construction de ce bâtiment en dur, en organisant des repas, et toutes sortes d’actions pour collecter des fonds. C’est leur projet !  

Un bâtiment à l’abandon faute de moyen.

 

Voilà le futur bâtiment « Partage d’Ailleurs »

Totalement séduit, je décide de revenir le lendemain, lundi, pour pouvoir filmer les enfants dans cet environnement. Tant pis pour les lombaires, je suis tellement heureux de sentir que l’histoire de Partage d’Ailleurs, telle qu’on l’espérait, est en train de s’écrire… Jour 4. Malgré la fatigue, la nuit a été courte. Partagé entre épuisement (nous avions plus de 300 KM au compteur hier) et excitation, je n’ai finalement pas trouvé le sommeil, tournant et retournant le projet sous toutes ces coutures. J’ai imaginé, vingt façons différentes de récolter des fonds, je pense que ça y est, le projet m’habite ! Nous voilà reparti pour Pra Moy. Le gouverneur qui devait revenir est retenu par une affaire urgente, il nous rejoindra dés que possible, nous sommes tout de même bien accompagnés. Caméra à la main, je filme tout ce que je peux. Je suis vraiment mauvais dans la mise en scène et les prises de vues. J’espère que je pourrai tirer le meilleur de tout ce que je vois. L’école fourmille,  certains élèves me regardent d’un œil curieux, d’autres me saluent avec un large sourire.  

Fin de récréation!

  J’apprends que les enfants savent ce qu’ai venu faire ce grand Mr en short et basket. Il se dégage une certaine effervescence, un réel enthousiasme. J’essaie de rendre autant de sourires que possible, mais je veux aussi avoir un film correct… Bref, je ne maîtrise pas tout mais c’est un vrai bonheur. Au bout d’une heure de « shooting », la cloche sonne la fin de la matinée. Les enfants s’éparpillent et disparaissent pour la plupart. On nous offre une noix de coco plantée d’une paille pour nous rafraîchir et discuter des dernières précisions concernant l’école. Lamvinh reçoit un coup de fil du gouverneur qui se confond en excuses et nous invite à passer au « palais » avant de retourner à Pursat. Mon ami, qui a toujours un coup d’avance, me dit que c’est l’occasion  d’obtenir LE papier officiel, souvent très utile quand on entreprend un projet au Cambodge. On mange un morceau dans le même restaurant que la veille. Lamvinh commande une nouvelle fois pour moi… Ouïe ouïe ouïe ! Cervelle de je ne sais quoi, abats en tous genres avec mâchoire bouillie dans une soupe….hardos ! J’ai eu du mal, c’est fini on en parle plus ! Avant de retourner à Pursat nous nous arrêtons donc chez Mr le gouverneur. Au Cambodge, il ne faut surtout pas se fier au clinquant de la façade. Le bâtiment est impressionnant d’aspect, le style est discutable mais il ne manque pas d’ornements et de couleurs. L’intérieur est très années 60, tables en formica, armoires en vielle ferraille et murs délicatement mouchetés à la fiente d’hirondelles, c’est un peu glauque.  Tout ceci ne nous empêche pas de signer des documents, de faire des photos officielles devant le drapeau du Cambodge, etc … Spéciale dédicace à Chris : C’est bon mon gars on tient un jumelage avec l’école de Pra Moy !!! Sur la route du retour, un seul arrêt. Nous stoppons chez la productrice de poivre qui nous avait si bien accueilli à l’aller. Une fois de plus, si Lamvinh peut rendre service… Cette femme nous avait raconté l’histoire de sa fille qui s’apprête à quitter le Cambodge pour aller vivre avec un français de région parisienne. Français qu’elle n’a connu qu’à travers les réseaux. Elle est paniquée. Lamvinh n’a pas traîné avant de proposer ses services pour vérifier la crédibilité de ce jeune homme. Une fois les coordonnées échangées, nous sommes repartis. Arrivé à Pursat, je jubile à l’idée d’une bonne douche et d’un bon lit. Tant d’émotions  m’ont épuisées. Lamvinh lui… il continu. Il doit passer à l’hôpital pour préparer les salles opératoires… Je m’incline ! En plus d’être un exemple de dévouement et de gentillesse, ce petit bonhomme de 57 kg et 79 ans est inarrêtable. C’est une personne d’exception sans qui je n’aurais pas fait le tiers de ce que l’on a fait en quatre jours. On lui doit beaucoup…